Claudine Arrazat – Critique Théâtre Clau – “PRISON”

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PRISON Texte, écriture, jeu et mise en scène : Aymeri Suarez-Pazos

16 Décembre 2023

-@Charlene-Martin-

-@Charlene-Martin-

Puissant, Violent, Bouleversant

Aymeri Suarez-Pazos nous offre un texte puissant, fort et brut, dans un langage impulsif, saccadé où les mots vous percent le cœur et vous bouleversent.

Prison est le premier texte d’une trilogie écrite en 2012 et enrichie plus tard à la suite d’entretiens, d’échanges et d’ateliers d’écriture en milieu carcéral menés à la maison d’arrêt d’Angoulême.

Dans Prison nous rencontrons le personnage à la veille de sa probable condamnation à la réclusion criminelle pour des faits commis dans sa minorité, ensuite dans la nuit qui précèdera sa libération (Prison II – Centrale –), enfin 10 ans plus tard.

-@Chinatsu-Kosakatani-

Le personnage nous parle de sa vie, de son enfance, de son adolescence. Une vie qui apparait comme une succession de prisons intérieures dont il faut s’extirper pour être soi, être reconnu et être aimé.

« C’est quoi le truc de la vie qui te fait tout rater, alors que tu fais qu’attendre, qu’attendre, ou chercher, chercher sans voir ? C’est dans le ciel, ils disent, d’autres. Ben oui. Putain. Et moi je suis où »

Une mère morte trop tôt, un père inaccessible aux multiples maitresses qu il n’aura pas eu le temps de connaitre.

« Des femmes qui passaient comme ça, sans que j’existe, -et moi j’aurais voulu qu’elles n’existent pas ! », un père qui disait « Ce n’est rien c’est mon fils »

Enfermé dans cette jeunesse blessée, douloureuse et incomprise, notre jeune homme essaie de sortir de cet enfermement, de trouver son identité.

Placé de foyer en foyer, ce garçon perdu, se cherchant désespérément, franchira des barrières qui le mèneront en prison.

-@Chinatsu-Kosakatani-

Au milieu de cet enfer, il y eut tout de même une belle mais éphémère rencontre avec Véronique sa belle-mère.

« J’avais déjà quatorze ans peut-être, j’étais déjà un caïd… elle me disait : qu’est-ce que tu fais, ce n’est pas toi… elle ne cherchait rien avec moi, elle s’intéressait, juste. »

Sur le plateau, une table et une chaise avec grand talent, Aymeri Suarez-Pazos joue, manie, déplace, renverse ces éléments avec une énergie fulgurante et nous mène dans les différents lieux du déroulement de ce récit : la prison, la maison, un cinéma, le foyer…

La composition sonore de Charlène Martin intensifie fortement les émotions, les portes de la prison claquent, les paperasses du commissariat s’envolent mais, lorsque la tension devient trop forte, la Tosca de Puccini retentit.

A travers la chorégraphie de Chinatsu Kosakatani, la gestuelle d’Aymeri Suarez-Pazos s’envole, tremble, se tord , s’immobilise dans l’espace pour libérer  un corps traumatisé par les angoisses intérieures.

Aymeri Suarez-Pazos est impressionnant, sa présence envahie le plateau, son visage expressif, son jeu puissant nous captivent et nous bouleversent.

Un beau et émouvant moment de théâtre dont nous attendons avec impatience les deux autres chapitres.

Claudine Arrazat

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